Et si on descendait des falaises...pour voir
Banfora (Burkina)
On a vu, dans les articles précédents, qu'il existe de nombreuses gravures et peintures rupestres dans les abris sous roches et grottes situées dans les falaises. Par contre aucune ne semble avoir servi de lieu d'habitation, contrairement aux sites des Monts Mandingues au Mali.
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Photo d'un des multiples signes que l'on découvre dans les abris sous roche
Mais, comme l'aurait dit La Palice, si ces signes existent c'est que quelqu'un les a dessinés.
Quelqu'un qui a sans doute habité à proximité. Il devrait donc fatalement y avoir des traces.
C'est pour cela, que pour cette dernière recherche, je me suis plus intéressé aux traces anthropiques visibles dans ce secteur.
Sur la carte vu du ciel, on voit les cascades et le lit asséché du cours d'eau. Le village et les ateliers de taille de pierres sont en bas dans la plaine. Un des sites où l'on trouve des gravures est situé en haut des éboulis sur le flanc de la falaise.
C'est en essayant de trouver un raccourci pour descendre des falaises que nous sommes tombés sur ce qui, actuellement, doivent être des cours d'eau saisonniers mais qui ont dû être assez importants il y a des centaines d'années. Preuve que l'eau y était en abondance à l'époque.
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Sur la droite on remarque un passage d'eau
Finalement, nous descendons par un cours d'eau asséché durant une grande partie de l'année.
Le site 7 se trouve à quelques dizaines de mètres en dessous. On voit la cimes des arbres situés en bas, mais on ne peux pas descendre car la falaise est à pic.
Dans le lit du cours d'eau, on remarque une 'marmite' d'environ 1m80 de profondeur et au fond une pierre ronde d'environ 50 kg. Cela prouve qu'à l'époque le courant devait avoir une force et un débit importants pour faire un tel trou.
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En bas des falaises, on trouve un paysage verdoyant pour la région. Signe que l'eau y existe encore en sous-sol.
En progressant vers l'ouest, on ne trouve plus de signe intéressant dans les falaises. Par contre, on peut voir de nombreuses traces d'habitations dans la plaine.
En particulier des ateliers de tailles d'outils en pierre. Souvent mis à jour par les eaux de ravinement.
Ce qui est surprenant c'est que le matériau qui constitue ces constructions ne semble pas provenir du secteur. Cela ressemble a un argile rouge assez résistant.
Extrait de : "Les premières constructions humaines : le règne de la terre crue"
"Depuis le néolithique, les hommes ont construit des habitations pour se protéger de leur environnement et des animaux. Dans les pays tempérés, les premiers constituants de l’architecture furent le bois, le feuillage et les peaux d’animaux. En revanche, sur la plupart des rivages méditerranéens la végétation se fait plus rare, les hommes utilisèrent alors un matériau qui traversera les siècles : l’argile, c’est-à-dire la terre crue. En Mésopotamie, les premières cités furent construites en terre crue. En dehors des pyramides d’Egypte, il ne reste malheureusement que peu de vestiges architecturaux datant de cette période de l’Histoire car la terre crue se dégrade plus rapidement que la pierre. De l’empilement de pains de terre façonnés à la main, on commence à ériger des bâtiments en utilisant des briques de terre. Plus tard, les ouvrages de fortification suivis de l’apparition des coupoles révolutionneront les procédés de construction. Ces dernières avancées en construction donneront naissance à des temples gigantesques et à des villes-temples, il y a environ 5 000 ans. Des vestiges de bâtiments en terre crue ont ensuite été découverts dans toutes les régions du monde."
On peut donc imaginer que les habitants de ce village ont effectué les gravures des différents sites situés à proximité. A l'époque, l'eau devait couler en abondance si l'on considère les marques laissées dans la falaise.
Ces mêmes habitants auraient pu aussi être les auteurs des ateliers de taille. Durant des générations, ils ont été susceptibles de vivre auprès de ce cours d'eau puis sont partis lorsque le cours d'eau est devenu saisonnier. Ainsi, même si les vestiges de constructions visibles aujourd'hui ne datent que de quelques centaines d'années, la fondation du village pourrait remonter à plusieurs milliers d'années. Ce qu'attesterait la présence des ateliers de taille qui pourraient dater du Néolithique. En Afrique saharienne la période du Néolithique s'étend de 5000 ans jusqu'à 2000 ans avant Jésus Christ. La fin du Néolithique commence avec le début de la métallurgie.
A proximité, on ne trouve aucun bas fourneau qui aurait pu attester la présence d'une industrie métallurgique comme dans les monts Mandingue au Mali. Cependant, il existe des traces d'une industrie du fer sur le plateau en haut des falaises.
Les différentes gravures et peintures que l'on trouve à proximité ont, de toutes vraisemblances, été exécutées par les populations de ces villages.
Certains des graphismes trouvés au niveau des falaises ressemblent fort à ceux trouvés en bas. A la différence près que ceux du bas semblent moins élaborés. On pourrait imaginer que les graphismes du haut sont plus récents que ceux du bas, et qu'ils ont été en quelques sortent 'améliorés'. De plus, ils ont l'air moins usés dans certains cas.
Il y a cependant d'autres graphismes ou peintures totalement différents et qui représentent des figures zoomorphes, anthropomorphes ou d'outillages, moins abstraites que les figures formées de points et de cercles.
D'ailleurs, elles peuvent cohabiter sur un même site, aussi bien sur le plateau en haut des falaises que dans les falaises elles mêmes.
Sur le plateau en haut des falaises : A côté de figures assez sophistiquées formées de points et de cercles, on trouve des représentations de ce qui pourraient être des boucliers ou des outils.
Cela confirme donc ce que l'on pensait, à savoir que les différents signes ont été tracés à des époques différentes et par des populations différentes, tout en s'inspirant, pour certaines, des travaux de leur prédécesseurs. Il est même possible que ces 2 populations n'aient pas eu de lien direct ensemble à cause d'une chronologie différente. D'ailleurs, si on se renseigne actuellement auprès des population, personne ne semble savoir par qui ont été tracés ces vestiges.
Par contre dans les monts Mandingues, je n'ai jamais trouvé d'atelier de taille. Ca ne veut pas dire qu'ils n'existent pas.
Dans les monts Mandingues, l'industrie du fer se faisait dans la plaine et les habitants vivaient dans les grottes et abris sous roche. Au Burkina, les habitants vivaient dans la plaine et les abris sous roche servaient de lieux de culte.
Cependant, un des sites découverts dans les monts Mandingues ressemble à ceux qui semblent les plus anciens dans les falaises de Banfora.
On pourrait ainsi imaginer une relation entre ces représentations.